J’ai mis du temps avant d’accrocher vraiment avec le yoga. Il y avait toujours quelque chose de différent qui m’intéressait plus dans les cours de yoga que dans les cours de pilates ou d’abdo-fessiers, mais les premiers mois, voire même les premières années, ont été une lutte. Je n’ai pas été touchée par la grâce du yoga dès que j’ai mis mes pieds sur mon tapis, loin de là . Il aura fallu partir une semaine en Italie pour être conquise.
Après deux ans de pratique de yoga à Paris, j’en étais à peu près au même niveau : un corbeau instable, un triangle pas très droit, l’ennui profond en savasana. La prof que je suivais à Paris faisait la promotion de vacances de yoga qu’elle organisait à l’automne. Elle disait vacances pour ne pas dire retraite, qui aurait donné un côté ermite illuminé – tant mieux. J’ai lu des dizaines de fois la brochure qui présentait cette semaine en Italie, deux cours de yoga par jour, de la philosophie, du temps libre l’après-midi. C’était très tentant, mais je n’arrivais pas à passer le cap. A l’époque, je venais juste de décrocher mon CDI, les jours de vacances étaient peu nombreux, et dépenser 1,000 euros pour une semaine de vacances me semblait hors de prix. J’ai discuté avec ma prof, qui, contrairement à ce que je pensais, n’a pas du tout cherché à me convaincre. Elle ne m’a pas sorti le discours yogi-love du  « ce sera une expérience transformatrice, et puis tu vas vraiment devenir meilleure si tu pratiques deux fois par jour ». Elle m’a juste dit qu’elle attendait ce moment de l’année, que c’était un chouette endroit et que non, je ne m’ennuierais pas l’après-midi quand il n’y avait rien de prévu au programme (je crois qu’elle ne voyait même pas de quoi je parlais). C’était tout.
J’ai franchi le cap, j’ai payé ma semaine de yoga, acheté mes billets d’avion, et je me suis arrangée avec d’autres personnes du groupe que je ne connaissais pas à l’époque, pour faire le trajet entre Rome et l’auberge en Ombrie, pas loin d’Assise. J’ai juste dit au boulot que je partais en Italie, j’ai dit seulement à mes copines proches que c’était pour faire du yoga, avec des gens que je ne connaissais pas, dans un endroit paumé mais qui avait l’air beau sur le site Internet. Je n’avais pas pour autant l’impression de me lancer complètement dans l’inconnu, j’avais confiance en ma prof, mais je ne savais pas vraiment ce que j’allais trouver là -bas.
L’endroit était absolument magnifique : une vieille bâtisse restaurée perchée sur une colline, des chambres luxueuses et sobres, et pour aller au studio de yoga, on marchait sur un petit chemin avec des cailloux blancs. Les repas étaient délicieux, des plats préparés avec les fruits et légumes du jardin. On pouvait aller se promener dans les oliviers aux alentours, le temps d’automne était divin, il faisait chaud la journée, plus frais le soir. La nuit, un ciel tout noir, des étoiles. Aucun bruit de l’extérieur.
Le premier jour, on a appris à faire connaissance, par petit groupe, on était une dizaine, j’étais la plus jeune. On discutait, quels sont tes points forts ? Pourquoi es-tu venu là ? Je n’en avais pas vraiment la moindre idée. Premier cours de philosophie, on parle des yamas et des niyamas, je découvre tout un système de pensée, petit à petit, sous forme de discussion, et sans le côté cours magistral.
Le yoga était… magique. Le cours du matin était un cours de vinyasa dynamique ; à l’époque, j’appelais juste ça yoga : on bougeait, on respirait. L’après-midi, alors que j’avais peur de m’ennuyer car il  n’y avait rien de prévu, c’était piscine, jacuzzi et hammam, discussions, promenades, lecture. Et puis vers 17h, c’était le yoga du soir, beaucoup plus yin : une pratique douce, des postures calmes, tenues pendant un moment. Le studio plongeait petit à petit dans la pénombre, on pouvoir apercevoir le soleil se coucher derrière la colline, en face. Le moment un peu bizarre pour moi est arrivé ce premier soir : on a chanté des kirtans, des chants en sanskrit. J’ai réprimé un fou rire en psalmodiant ces lignes de chant. Et puis j’ai joué le jeu : je me suis dit que de toute façon, au milieu de cette salle d’Ombrie, au milieu d’inconnus, enveloppée dans ma grosse couverture, je n’avais qu’à chanter, personne n’allait se retourner, me prendre en photo et se moquer de moi. J’ai chanté, c’était libérateur. Le soir, après le repas, je rigolais avec ma copine F. qui elle aussi avait du mal avec les chants en sanskrit – tout en reconnaissant leur pouvoir cathartique.
Ces vacances de yoga restent pour moi le moment décisif de ma pratique de yoga, le moment où j’ai compris qu’on pouvait s’accepter tel qu’on est, ses parts d’ombre et de lumière, et en même temps travailler à devenir différent. Etudier un nouveau système de pensée aussi, tout en réfléchissant à comment l’adapter à sa propre vie. Apprendre à apprécier la compagnie d’inconnus qui deviennent des amis, se dire qu’on a le droit de prendre du bon temps, que ce n’est pas réserver aux autres. Réfléchir sur soi, pleurer (qu’est-ce que j’ai chialé cette semaine-là ), et en même temps rigoler et boire des coups le soir. J’ai adoré cette semaine, elle a été transformatrice, et je suis contente de ne pas l’avoir su à l’avance, d’y être allée sans trop savoir ce que j’allais trouver et qui j’allais rencontrer.
J’aurais pu appeler cet article Des vacances de yoga, ou comment changer sa perspective sur soi, le monde et les autres en 5 cinq jours (titre vendeur), mais chacun vit sans doute ce moment selon sa propre sensibilité et sa propre expérience. Pour certains, ça peut juste être le moment de se détendre et d’aller à la piscine, pas besoin que ce soit dramatique.
En tout cas, cette semaine de yoga, ces gens, ce moment particulier ont changé ma pratique du yoga, et par conséquent ma vie en général. J’y suis retournée l’année suivante, et trois mois après, je partais vivre aux Etats-Unis. Tous les ans, fin septembre, début octobre, Alexandra organise des vacances de yoga en Italie. Cette année encore, j’ai reçu son email, je n’irai pas cette année, mais j’espère un jour me reprendre une semaine de vacances de yoga avec mes amis, en plein coeur de l’Italie, pour voir ce qu’il va se passer cette fois…
Canalis
Oh mon dieu, ça a l’air super sympa ! *-* L’hotel aussi a l’air plutôt beau gosse…
C’est vraiment l’une des raisons pour lesquelles je dois apprendre à sortir de ma zone de confort : pouvoir vivre des expériences aussi sympas !
Geckoo
De belles images qui me rappellent également de super souvenirs 😉
Un superbe endroit, des gens charmants, et une magnifique semaine de yoga avec une prof génial ! J’y retournerais bien également !! Merci pour cet article Mathilde.
Severine
Mon prof de yoga aux US – que j’adore – organise 2 fois par an une retraite de yoga au Salvador.
Apparemment c’est très sympa. Malheureusement je ne crois pas que j’irais dans un futur proche car prendre une semaine sans mari et enfants c’est pas encore negotiable.
Mathilde
Hey oui, la plupart des profs américains partent en Amérique latine pour les retraites… l’offre ne manque pas non plus par ici. Dur de trouver le temps, et l’argent.
Aleksandri Delabulgarie
Ca fait rêver, c’est sûr ! Merci de ce partage de vécu, Mathilde !! C’est très appréciable, d’autant plus que, j’en suis sûre, on est nombreux à lire et relire ces programmes de « vacances yoga » et se dire qu’on aimerait bien y aller, mais que c’est pas le bon moment pour x raisons…alors qu’au fond on sait que la vraie question est « Alors, quand est-ce que je vais réussir à sortir de cette fameuse zone de confort et juste être capable d’apprécier une semaine dans un lieu magnifique à se faire du bien ? Et alors, je connais pas les gens, et alors, c’est des gens comme moi au final… » Bref ! Ca fait réfléchir 🙂 P.S. Mais, surtout, c’est quoi le délire avec les sessions de chialade ?? J’en entends tout le temps parler..:)
Mathilde
Merci pour ton commentaire, quoique l’expression « sessions de chialade » m’a vraiment fait bondir… Beaucoup d’émotions pendant ces semaines où on n’a qu’à s’occuper/prendre soin de soi. Pas de repas à préparer, pas de pression du boulot, juste être avec soi-même, dans un cadre idyllique. Alors oui, le yoga dans ces conditions fait remonter des émotions – on ne fait pas que pleurer, heureusement, on se marre aussi, c’est léger !
A+
Céline
Très bel article, Mathilde. Ça a l’air idyllique et libérateur en même temps… (et ça donne envie de faire du yoga!)
dreyliciouss
Ca a l’air génial comme voyage. Voyage spatial. Mais aussi voyage de l’esprit.
Ca peut changer la vision des choses j’en suis certaine!
Je commence tout juste le yoga et j’espère que des séjours comme celui-là sont organisé!
Margaux #LaRoutedelaForme
Le décor est juste magique O_O
Cela me tenterais bien mais j’imagine qu’il faut un certain niveau pour faire ce genre de vacances?
Un cours de yoga à Paris | gravitychallenger
[…] mais en même temps je ne pense jamais avoir lu de témoignage de personnes ayant directement accroché. Quoi qu’il en soit, j’ai trouvé cette séance sympa et oui, j’ai bien envie […]
Sunday Morning #6 | hellozadig
[…] Italie (et qui a été un véritable déclencheur pour elle) m’a terriblement donné envie : ici. Pour ma part, je projetais de m’offrir (pour mes 30 ans l’an prochain) un séjour […]
sandrine Gil
nous souhaitons vous contacter pour organiser avec vous un sejours yoga en ESPAGNE.
breton
Serait-il possible d’avoir l’adresse?
Merci !