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Depuis quelques mois, je m’emballe pour la pratique de la méditation. Une fois par semaine, je m’asseois dans une grande salle chaleureuse au dernier étage d’une maison victorienne pour 45 minutes de méditation en pleine conscience, 15 minutes de pause, et 75 minutes de « dharma talk » avec à chaque fois un nouvel intervenant.
L’intérêt de cette dernière heure et quart de discussion dépend vraiment de qui parle, certains intervenants sont clairement ennuyeux, tandis que d’autres ont une façon brillante de présenter des choses simples. Vous l’aurez compris à la lecture de ce blog, je déteste quand on alambique les choses, quand on est trop éloigné des choses simples (mon côté Herta), qu’on intellectualise, sophistique, brasse des concepts avec un art creux du blabla.
Bref, récemment, l’un des intervenants était passionnant. Je note sur le programme du mois qu’il propose un atelier de méditation le weekend suivant, à destination des jeunes adultes, entre 18 et 35 ans. Comme il ne me reste que quelques années pour faire partie de cette tranche d’âge, je ne voudrais pas qu’une vérité m’échappe, tant qu’il est encore temps : je m’inscris. J’arrive même à convaincre Manu.
En arrivant au centre de méditation le dimanche en question, je vais pointer mon nom à l’accueil, et là, surprise : on m’assigne une tâche. Moi qui pensais m’asseoir et vivre une journée passivement, c’est raté. Et le pire, c’est que cette tâche me révulse : on me demande de nettoyer les toilettes, après la pause déjeuner. J’ai envie de rigoler – et surtout de m’énerver. J’ai payé pour cette journée, et je vais nettoyer les chiottes ? Tout le monde se voit attribuer une tâche qu’il doit effectuer « en pleine conscience », ça fait partie de la journée de méditation et de la participation à la vie de cette association. Je suis atterrée. Manu se voit attribuer la même tâche que moi, nettoyage des chiottes à l’étage du dessus. Ça, par contre, ça me fait rigoler. Karma de merde.
On monte au dernier étage, il y a déjà une vingtaine de personnes. Je m’assieds sur une chaise, je retrouve sur l’estrade au milieu de la pièce le fameux intervenant qui m’avait tant plu. J’ignore le déroulement de la journée. Je suppose qu’il faut commencer par méditer. Je m’y mets. Observation, respiration. C’est parti.
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1 heure plus tard, A. déclare que c’est la fin de la première séance de méditation, on fait une pause de 5 minutes, et ceux qui ont des tâches à faire – comme préparer les légumes pour le déjeuner – s’éclipsent. Mon esprit boucle sur ce « détail » de ma propre tâche. Qu’est-ce que je fous là au lieu de profiter d’un dimanche peinard ? Je n’arrive pas à en revenir à l’essentiel de la méditation : rester conscient de ce qui se passe, à l’instant présent. Enfin si, ce qui se passe en moi, c’est la lutte pour rentrer chez moi.
A. annonce la suite du programme : 20 minutes de méditation en marchant. Je n’ai jamais fait de marche méditative auparavant, il explique le principe : marcher en méditant. Ok.
C’est parti pour 20 minutes à tourner dans la salle, comme des zombies, très lentement. J’avoue que ce matin-là, ce type de méditation est plus efficace que la méditation assise : je bouge lentement, je décortique le mouvement du corps, je sens la lourdeur de mes bras, des tensions par-ci, par-là, le rythme de la respiration qui s’allonge. En passant près de l’estrade, je louche comme si j’avais le pouvoir d’expulser mes yeux de leurs globes oculaires pour regarder le programme de la journée, posé par terre. C’est affarant :
- Méditation assise
- Marche méditative
et ainsi de suite, jusqu’à 17 heures. Là j’en suis sûre, je déteste cette journée, je m’en veux d’avoir payé pour ça. Je veux rentrer. C’est tempête sous un crâne. Et il y a ces chiottes à nettoyer. J’essaie de convaincre Manu de partir, mais il est complètement absorbée dans la journée. Pas moyen d’en faire mon complice.
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C’est l’heure tant attendue du déjeuner qui arrive, mais hélas, on nous annonce la couleur tout de suite : déjeuner en silence, en toute conscience, bordel de merde. Observer les textures, les couleurs, profiter de ce que d’autres ont préparé pour nous. Heureusement, c’est très bon. Enfin ça fait très « repas qu’on sert dans un centre de méditation », une sorte de soupe de lentilles aux multi-légumes. J’espère que les gens ne vont pas trop manger, pour que les toilettes restent étincelantes…
D’ailleurs le moment de la fameuse tâche tant redoutée arrive, je lis la notice explicative dans un classeur, pour trouver les produits ménagers et suivre la procédure. Ça me prend environ 10 minutes, et… ce n’était vraiment pas si terrible ça. Vraiment. Tout ça pour ça.
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L’après-midi se passe beaucoup plus calmement pour moi. Je me suis mise au rythme de l’observation, du rester présent et du rester « consciente » de ce qui se passe. Il y a une courte séance de questions/réponses au milieu de l’après-midi, sur comment méditer. Je réalise un peu tard que la mention « jeunes adultes » n’est qu’une façon de lier la communauté, comme il y a le groupe de méditation pour les ados, les LGBT, etc. Pas de grande vérité révélée sur « être jeune » de nos jours. Je souris de mon impatience.
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La journée se termine en douceur, à 17 heures. On prend le thé tous ensemble, et oui, on peut enfin discuter et se dire bonjour ! Je réalise à quel point s’arrêter pendant toute une journée, passer du temps à observer, est essentiel pour ma survie mentale. Au lieu de se poser devant une série addictive en boulotant de la Ben&Jerry, bruncher à l’autre bout de la ville ou s’activer comme tous les autres jours de la semaine, c’est bien de juste s’arrêter et être là de façon consciente, et pas « abrutie ». Ce n’est pas facile de méditer, mais tout comme pratiquer le yoga, apprendre une langue étrangère, jouer d’un instrument, dessiner ou écrire n’est pas facile : ça se travaille.
celine
Je fais de la méditation depuis deux ans maintenant mais je ne pense pas que j’aurais eu le courage d’être aussi patiente que toi sur ce coup-là ! ceci dit, suffit d’accepter quo’n ne peut pas changer la situation pour mieux la vivre) mais waow, toute la journée ? Chapeau ! Au final, tu ne dis pas trop si t’as apprécié cette journée ou pas…
Mathilde
Hello Céline ! C’est à tenter en tout cas. Est-ce que ça m’a plu ? Oui ! bien sûr, enfin comme je l’ai décrit, c’était tempête sous un crâne, mais j’ai fini par lâcher prise.
Bises !
Ariane
Hello Mathilde, j’ai eu une journée de méditation un peu similaire pour conclure un cycle MBSR (mindfulness based stress reduction) et cela m’avait paru beaucoup plus facile qu’imaginé car les types de méditation variaient : assise, en marche, repas en silence…mais pas de corvées en pleine conscience pour nous ! J’ai notamment le souvenir amusant qu’il fallait attendre que tout le monde se soit servi un par un au buffet pour commencer à manger et j’en parle parfois à mes patientes qui se jettent sur leur assiette en se mettant à table. Bon dimanche !
Mathilde
Hello Ariane,
Merci pour ton témoignage. C’est vrai qu’on appréhende ce genre de journée, alors qu’en fait, c’est faisable ! (bon, peut-être pas dans tous les cas, mais bon…).
C’était plaisant le repas en silence, mais je trouvais que les gens faisaient un peu la tête ! on peut faire attention à ce qu’on mange, sans avoir l’air super triste !!
Flora Yoga
Salut Mathilde! Ton article m’a fait beaucoup rire! Je suis épatée par la réaction de Manu! Mon copain aurait fui le plus loin et le plus vite possible!!
Je me suis mise à la méditation il y a quelques mois seulement mais cela fait désormais partie de ma vie. J’essaie de trouver 5 à 10 minutes dans ma journée pour m’assoir et tout simplement prendre conscience de mon corps, de ma respiration, et du fait que je suis là dans le moment présent.
Quand j’ai lu le titre de ton post je me suis « Whhhaaaaaaaaaat? » Quelle détermination!! Tout en lisant ton article je me dis que je ne me sentirait pas capable de faire une telle expérience, que c’est trop dur, trop long… Et finalement tu conclut en disant tout simplement que s’arrêter pendant toute une journée fait du bien au mental et finalement je me dis.. pourquoi pas tiens? On en a tous besoin après tout! Et il faut être ouvert aux nouvelles expériences, aux nouvelles rencontres (même si on ne se parle pas vraiment ^^) et plonger dans l’inconnu!
Alors merci d’avoir partager cette expérience! Bonne fin de week-end! xxx
Mathilde
Manu est assez ouvert à la méditation 🙂 et il aime bien le yoga restorative, donc c’est un « client » facile pour ce genre de journée.
Je suis sûre que tu peux faire ce genre de journée complète de méditation, on était nombreux dans la salle !!
Bises,
Caroline
Super expérience!
En ce moment la retraite de 10 jours Vipassana m’appelle … mais hier un instructeur m’a conseillé de commencer par une journée entière avant de me lancer. Et aujourd’hui ton article!
Mathilde
Je ne sais pas ce que c’est ! Dis m’en plus…
Caroline
Merci Mathilde, toujours pour cet humour et cette humilité, cette distance amusée avec laquelle tu racontes cette journée, c’est exactement ça, le fait qu’on se cramponne à des choses minuscules qui prennent de l’importance … et que lorsqu’on finit par lâcher prise, on se rend compte à quel point ça fait du bien. De se laisser faire, de se laisser emmener. D’accepter.
Ta description de tout ça est très juste.
Mathilde
Merci pour ton message, il est super sympa, et je suis contente que le message soit passé !
A bientôt,
Paula
J’ai rigolé à voix haute en lisant « merde de karma » 😉
Mathilde
Ah !
Ben c’est ça parfois, c’est juste un bon vieux karma de merde.
Bises !
Emilie - #MyHappyYoga
Intéressant! Comme la plupart d’entre nous, je suis plutôt admirative de ta motivation! Apparemment, la journée a été dure, mais tu ne regrettes rien. Au contraire, tu dis même que c’est vital. Du coup franchement, est-ce que tu penses réitérer l’expérience de ce genre de stage?
Merci pour ton témoignage en tout cas 🙂
Mathilde
Hello Emilie,
En fait, je n’avais pas vraiment à me motiver, je ne sais pas comment dire, ça me faisait plaisir d’y aller, et honnêtement, je ne savais pas trop dans quoi je m’embarquais, je pensais qu’on passerait plus de temps à discuter, ou à écouter des mini-conférences.
Je pense recommencer oui, ce centre de méditation est un lien génial.
Mathilde